« Même les ‘petites’ décisions convoquent parfois de grands enjeux»

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Discussion avec François-Xavier Blanpain, vice-président et membre du Collège d’autorisation et de contrôle du CSA depuis 2012, sur sa casquette de collégien et sa vision de la régulation de l’audiovisuel.

Cela fait plusieurs années que vous êtes collégien. Qu’est-ce qui vous motive le plus dans ce rôle ? 

Ça fait 7 ans que je suis membre du CAC du CSA. La réponse est simple : participer au développement d’un secteur à la croisée d’enjeux culturels, démocratiques et technologiques importants. Les médias ont cette particularité d’exprimer et de façonner en même temps nos identités collectives, culturelles et jouent un rôle important dans notre démocratie. Dans ce contexte (globalisation, fake news), il est très important d’avoir un paysage de médias d’information (le 4ème pouvoir…) dynamiques, indépendants et qui respectent tous les mêmes règles communes.

Les dossiers d’envergure n’ont pas manqué ces dernières années au CSA. Quel est celui qui a retenu le plus votre attention ?  

Tous ! Il n’y a pas de petits dossiers, même lorsque l’on autorise des fréquences provisoires il y a des enjeux culturels, techniques, voire idéologiques. Mêmes les petites décisions convoquent parfois des valeurs démocratiques essentielles (égalité, non-discrimination, respect de la diversité…)

Il y a évidemment des dossiers plus lourds : régulation du câble, plan de fréquences, compétence territoriale. Sur mes 7 années au CSA, il n’y en n’a pas deux qui se ressemblent mais 2016 a sans doute été la plus marquante, avec les prémisses du plan de fréquences, la refonte du décret SMA et un combat malheureusement perdu par le CSA et son collège d’avis pour défendre le pluralisme des médias.

Dans le dossier de l’ouverture du câble à la concurrence), nous avons fait bouger les lignes en faisant reconnaître la réalité des « zones blanches »  jusqu’alors très mal prises en considération par la régulation.

Un nouveau Collège vient d’être mis en place, une nouvelle ministre des médias est aussi en en fonction. Quelles seraient vos messages pour eux ? 

Ce n’est pas « l’ensemble » du Collège qui est renouvelé, mais une partie (1/3). Et c’est une bonne chose que de combiner renouvellement et continuité, sensibilités nouvelles et  mémoire, qui est un gage de cohérence dans l’action. La stabilité de la jurisprudence du CSA est importante. Nous ne pouvons pas prendre une décision quelques années auparavant et faire l’inverse quelques années plus tard. Mais si je devais adresser un message aux nouveaux collégiens, je leur dirais d’oser la créativité. Je reconnais que parfois, nous avons été un peu frileux sur certains dossiers, à l’égard de la RTBF notamment.

A la nouvelle Ministre des Médias, je voudrais modestement dire qu’il y a parfois des réformes auxquelles on consacre beaucoup d’énergie pour un bénéfice qu’on ne voit pas (nous avions de nombreuses réserves autour de la précédente révision du décret SMA). Et d’autres qu’on néglige alors qu’elles seraient structurantes  : le décret RTBF a plus de 20 ans. Un service public en pleine transformation a probablement besoin d’un nouveau cadre régulatoire.  

Enfin, il faut que la régulation soit effective, avec un effet utile pour les citoyens. L’autorégulation est une démarche intéressante, mais qui n’a pas encore fait ses preuves de manière spectaculaire. Le décret SMA  offre la garantie d’une action efficace dans le cas où un média ne respecte pas ses obligations de base à l’égard des citoyens (dignité humaine, protection des mineurs, balises en matière de communications commerciales).

Votre valeur fondamentale quand on parle de régulation des médias ? 

Le pluralisme des médias, sans hésiter. Il est très important et essentiel pour la démocratie. C’est grâce à une pluralité de médias indépendants que la liberté d’expression et les diversités peuvent être respectés. Le pluralisme est consubstantiel à la démocratie.

Qu’est-ce qui marquera l’année 2020 au Cac selon vous ? 

Qu’elle va suivre 2019, qui était l’année du plan de fréquences et des premiers pas de la nouvelle directive SMA. En 2020, notre attention se portera naturellement sur les nouveaux entrants du paysage radio – le CSA a toujours été soucieux d’accompagner les régulés pour « atteindre les objectifs de la régulation » (plutôt que de sanctionner pour sanctionner). Et sur la transposition de la directive qui devra consolider le périmètre de régulation des médias, offrir de nouveaux outils au CSA.

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