« Grand et inspirant », un des employés de NGroup (NRJ-Nostalgie-ChérieFM -NRJ Hits TV) nous glisse ces qualificatifs à l’accueil pour décrire la personne que nous allons rencontrer. Nous attendons quelques minutes et la voix éraillée et charismatique de notre rendez-vous se fait entendre au bout du couloir. Marc Vossen, Directeur Général du Groupe, nous reçoit dans son bureau. L’objectif de cette rencontre est de découvrir la position de NGroup sur la question du « pluralisme des médias ».
Marc Vossen s’est beaucoup penché sur le sujet, d’abord dans sa propre histoire, depuis les radios pirates qu’il écoutait dans sa jeunesse, jusqu’à aujourd’hui, où il veille à la bonne santé d’un grand groupe, en passant par son aventure chez l’ancêtre de Nostalgie (SIS) et ses neuf années au sein du service public, à la direction de feu Bruxelles-Capitale. Mais aussi dans l’actualité, qui annonce d’une part un nouveau plan de fréquences pour les radios en FM et en DAB+ et d’autre part sa participation active au Collège d’Avis du CSA pour répondre au projet de réforme de l’article 7 du décret SMA[1] qui pourrait voir l’encadrement du pluralisme réformé en Fédération Wallonie-Bruxelles. C’est un enjeu de taille pour les petites et grandes radios de notre territoire qui souhaitent voir renouveler leur autorisation et accéder à de nouveaux services.
Marc Vossen, vous avez, on peut le dire, de la bouteille en tant qu’homme de radio. Quand on parle de pluralisme du paysage médiatique, c’est aussi une question de valeurs et d’histoire. Le pluralisme des radios fait-il partie de votre histoire ?
Le pluralisme des médias a traversé toute mon histoire en radio, depuis plusieurs décennies. Pour moi, l’indépendance des radios, leur désir de libre parole et même la piraterie qui était leur réalité à l’époque (NDLR dans les années 60) sont à l’origine des valeurs qu’elles défendent. Si le pluralisme est une valeur cardinale des radios chez nous, c’est parce que, à l’origine, leur force, leur impact et ce pourquoi elles étaient entendues étaient liés à leur liberté d’expression et leur indépendance. Dès mon plus jeune âge, j’écoutais les radios pirates sur les bateaux qui écumaient les eaux internationales pour faire entendre leur voix. La naissance de ces radios pirates faisait naître l’idée que l’on avait le droit, en tant qu’auditeur, d’écouter des idées nouvelles. Chez nous, on ne pouvait entendre, à l’époque, que la RTB. Je suis convaincu que la piraterie a joué un rôle important dans les valeurs que nous défendons aujourd’hui autour du pluralisme.
La piraterie est donc à l’origine du succès de la radio en Belgique francophone ?
Selon moi, le fait que l’aventure ait débuté avec des radios pirates puis que les conditions politiques, sociales et économiques aient permis à ces radios de se développer a engendré une émulation de points de vue différents. Ces radios libres se sont ensuite transformées en radios privées. Le spectre radiophonique s’est enrichi culturellement et est devenu entrepreneurial. On a constaté ensuite que ces radios se sont fédérées et certaines ont pris le pas sur d’autres. Le fait d’avoir vécu sans réelle sécurité durant une trentaine d’années a permis à cette richesse de continuer à se déployer. Le système s’est autorégulé avec une richesse extraordinaire et il a ouvert une dynamique commerciale intense. La radio atteint aujourd’hui 15,5% de parts de marché des investissements publicitaires en FWB. La moyenne mondiale se situant entre 7 et 8%, nous atteignons le double, c’est énorme !
Cette richesse commerciale est due à la profusion et donc à la pluralité de radios non règlementées durant 30 ans. D’une certaine manière, la piraterie est un élément qui a procuré de la richesse à un système. Il faut préserver cet esprit pirate des radios belges.
Quel est le système économique des radios aujourd’hui ?
Le 1er juin 1982, on entend la première publicité nationale sur Contact. C’était la régie IP qui avait orchestré cette large couverture, mais avant cela, les radios avaient déjà commencé à faire de la pub locale. On s’arrangeait avec les commerçants du coin pour vendre des espaces publicitaires. Les radios grandissant, il fallait faire grandir les régies internes. Quand je suis arrivé chez Nostalgie en 2000, il y avait une régie interne pour la pub locale et IP s’occupait de la couverture nationale. Au fur et à mesure, le système avait amené les radios à se franchiser sous une même marque, à rassembler leur régie locale pour créer une seule entité capable de gérer les pubs dans les différentes villes. Au fil du temps, l’L’importance de la publicité nationale est devenue une réalité. Aujourd’hui, dans les radios communautaires (Bel rtl, Contact, Nostalgie, NRJ) et au sein des radios de la RTBF, 80% des publicités sont devenues nationales et 20% sont diffusées à une échelle locale..