Depuis le début de la crise sanitaire, c’est tout un programme entre le CSA et son homologue tunisien (la Haica) qui a été chamboulé. Jusque là, les deux instances étaient engagées dans un projet de jumelage intense, avec des visites et échanges plusieurs fois par mois. Avec le confinement, il a fallu se réinventer pour poursuivre l’aventure. Entretien avec Paul-Eric Mosseray, Conseiller Résident du jumelage pour le CSA.
- 6 mois ont passé depuis le début de la crise sanitaire. Qu’est ce que ça a changé pour vous ? Comment vous êtes-vous réorganisé ?
J’étais en poste à Tunis depuis septembre, pour assurer la coordination du programme de coopération entre le CSA et la HAICA avec laquelle nous sommes jumelé. Evidemment à la mi-mars tout s’est compliqué, lorsque là aussi tout le personnel a été envoyé en télétravail, l’UE a annulé toutes les missions d’experts, puis l’espace aérien a été fermé du jour au lendemain…Apres quelques jours de flottement, l’ambassade de Belgique a organisé un vol de rapatriement, drapeau belge hissé au comptoir d’embarquement d’un aéroport désert ! De retour en Belgique, on s’est lancé dans une réorganisation complète : renégociation du contrat européen, et bien sur le transfert de tous les formations et ateliers qui pouvaient l’être en visioconférence
- Quels sont les expériences positives que vous retiendrez des 6 derniers mois ? Les négatives ?
L’expérience positive, c’est la grande solidarité des collègues tunisiens et des tunisiens en général au début de la crise. Le président de la Haica vous apporte un couscous, le chauffeur vous emmène pendant le week-end à l’aéroport à 100 km de Tunis. Le Délégué de la FWB à Tunis Christian Saelens m’a aussi beaucoup aidé dans mes démarches (mes valises dorment dans son grenier !).
Et aussi faut-il le dire, l’expérience positive est leur capacité d’anticipation …J’ai subi mon premier test de température à l’aéroport de Tunis le 1er février, de retour d’une mission à Rabat, alors qu’aucune victime je penses n’était encore à déplorer en Tunisie …
L’expérience négative, c’est évidemment que ce Jumelage est aussi une aventure humaine, faite de contacts, de chaleur et d’amitiés et là, rien à faire : le gout du sandwich « Makloub » nous manque comme je pense celui du chocolat leur manque, et cette communication virtuelle si elle a permis d’avancer dans le programme, n’est pas adaptée à cette dimension-là.
- Vous êtes porteur d’un projet important au CSA. Un jumelage de 300 jours d’échanges entre la Tunisie et la Belgique. On suppose que tout a été chamboulé avec la crise sanitaire ?
Oui, tout a été et est toujours chamboulé. On a décidé plusieurs choses : prolonger le projet jusqu’à la fin de l’année, faire une pause en juillet et aout, étaler le programme d’activités entre visioconférence avant l’été pour espérer retourner ensuite à Tunis…
Ensuite tout le monde a dû s’adapter . Et là je veux remercier mes collègues du CSA qui ont fait preuve de beaucoup de flexibilité autant que les collègues tunisiens pour leur intérêt soutenu pour notre travail, même à distance.
- Septembre, c’est le moment de se projeter jusqu’aux portes de 2021. Qu’est ce qui vous attend d’ici là ?
D’abord, nous allons terminer le programme d’ateliers : construction d’un dispositif d’instruction des plaintes, contrôle du nouveau Contrat d’objectifs et de moyens de la télévision tunisienne, régulation de la protection des enfants et mineurs, méthodologie d’études en communication commerciale.
Ensuite nous allons poursuivre l’accompagnement de projets concrets qui ont été réalisés par la Haica sur la base des transferts d’expertise lancés depuis 2ans.
Enfin nous allons dresser le bilan de ce vaste programme, produire les différents supports d’information comme les guides pratiques et espérer organiser un évènement de clôture digne de cette expérience
- Quels sont les enjeux du secteur que vous couvrez ?
Pour le CSA, cette expérience pourra témoigner de notre expertise et de notre maturité à contribuer à la culture et à la pertinence de la régulation de l’audiovisuel hors de nos frontières, là où elle là plus nécessaire.
Pour la HAICA, elle va continuer à asseoir la légitimité d’une Instance constitutionnelle et sa contribution essentielle au pluralisme médiatique et à la transition démocratique en Tunisie, et avec la présidence du REFRAM qu’elle exerce pour l’instant, dans les pays francophones.