Par Arnaud Claes, lauréat du Prix du mémoire du CSA 2018
Internet incarne aujourd’hui un vivier de savoirs et de connaissances qui contribue à nourrir la création et l’innovation au sein de notre société. Nos modes d’expression, notamment audiovisuels, s’inscrivent de plus en plus sur ce média. Assurer sa préservation est un enjeu majeur pour garantir la diversité et la richesse de notre écosystème informationnel et culturel. Pourtant, alors qu’il n’a jamais été aussi facile d’enregistrer la moindre trace humaine, se souvenir n’a jamais été aussi difficile.
Les débats qui entourent la conservation du patrimoine dit « nativement numérique » se focalisent principalement sur les conditions techniques de sa préservation et les modalités de mise en place d’un archivage massif. Cependant, au-delà de ces interrogations logistiques, les quantités massives d’objets culturels numériques posent la question de l’appropriation concrète de ce patrimoine. Pour ne pas nous perdre dans l’immensité de nos minutieuses collections, les logiques archivistiques doivent également interroger les modalités d’interprétation et d’accessibilité du contenu. Dit plus simplement selon les termes de Bachimont, « on ne préserve bien que ce dont on se sert » (2010, p29). Dans le cadre du numérique, cela implique de compléter une intelligibilité technique par une intelligibilité culturelle (Bachimont, 2010). Sous cet angle, le travail patrimonial n’est pas à considérer seulement comme une pratique de stockage mais également comme un processus sémiotique (Treleani, 2017) qui vise à entretenir la circulation des idées au sein de la mémoire collective et à les mettre en débat dans l’écosystème intellectuel qui les accueille. La patrimonialisation peut dès lors être envisagée comme un acte de communication entre acteurs de l’espace public dans l’optique de négocier le cœur signifiant de l’archive et d’en faire sens pour la communauté.
En même temps, l’évolution des technologies de l’information et de la communication transforme petit à petit l’action culturelle qui doit s’adapter à une évolution des supports et des pratiques. La mise en scène du patrimoine au sein de l’espace public glisse progressivement d’une pédagogie hiérarchique du passeur à une pratique transversale de la médiation plus soucieuse de l’intégration des publics (Rasse, 2017).
Ce constat nous invite à interroger la possibilité d’un rapprochement entre ces deux conjonctures dans le cadre de l’action culturelle en Belgique francophone. De quelle façon l’évolution des pratiques de médiation culturelle peut rejoindre cette question sémiotique de l’archive ? Cette première intuition nous a emmené vers le questionnement suivant : quelles pratiques de médiation culturelle mettre en place pour contribuer à la préservation du patrimoine nativement numérique en Fédération Wallonie-Bruxelles ? A travers cette recherche, nous nous interrogeons plus fondamentalement sur la place de l’intermédiaire institutionnel au sein de notre environnement informationnel contemporain. Alors que les conditions d’accès à une information fiable et diversifiée semblent aujourd’hui être remises en question, nous essayons ici de replacer l’homme au cœur de la toile numérique (Doueihi, 2011) et de garantir un espace public multiculturel et vivant.
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