Porter la réflexion sur le genre sur l’ensemble de la chaîne de production-diffusion audiovisuelle. Joëlle Desterbecq

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Par Joëlle Desterbecq, Directrice des Etudes et Recherches, chargée de la diversité et de l’égalité entre les femmes et les hommes

 

Je suis Directrice des Etudes et Recherches. Le Département Etudes et Recherches poursuit plusieurs objectifs. Tout d’abord, un objectif d’analyse prospective sur le paysage audiovisuel, ses transformations et sur les enjeux régulatoires qui en découlent. Dans ce cadre, nous mettons en place des recherches sur un ensemble de thématiques qui se trouvent au cœur de notre activité de régulation : la protection des consommateurs, la protection des mineurs, l’égalité et la diversité, pour ne citer que quelques exemples. Ensuite, il s’agit de créer des espaces de dialogue et de débat sur les problématiques qui font l’actualité de l’audiovisuel. Enfin, le Département Etudes et Recherches vise à stimuler la recherche sur la régulation, éveiller l’intérêt des étudiant.e.s et des chercheur.e.s sur cette thématiques et développer des liens entre le CSA et le monde académique, belge et étranger.

L’égalité entre les femmes et les hommes est une thématique sur laquelle plusieurs projets de recherche ont porté. Les méthodologies de ces recherches sont différentes et leurs résultats sont nuancés. Néanmoins, un constat apparaît de manière transversale : il y a un déséquilibre entre les représentations des hommes et des femmes à l’écran tant sur le plan quantitatif que qualitatif.

Par exemple, la dernière étude que nous avons publiée portait sur la place et l’image des femmes dans un corpus de fictions de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Nous avons observé des résultats encourageants : il existe certaines évolutions et « reconfigurations » dans les représentations des identités de genre. Toutefois on a observé aussi que certaines de ces reconfigurations sont « ambivalentes », qu’un certain nombre de prescrits pèsent plus fortement sur les personnages féminins que masculins (beauté, parentalité, etc.), ou encore qu’il y a un plus grand équilibre entre les représentations quantitatives et qualitatives des personnages masculins que féminins. Ces déséquilibres transparaissent aussi dans les Baromètres de l’Egalité et de la Diversité réalisés par le CSA. De 2011 à 2013, ces études ont montré que les femmes sont sous-représentées à l’écran, qu’elles sont plus fréquemment représentées dans des rôles de « vox populi » (quidam, témoin, expérience personnelle) que de porte-parole ou d’expertes ou encore qu’elles sont moins fréquemment présentées avec leurs mentions identitaires (nom, prénom, profession) que les hommes. Néanmoins, des évolutions sont apparues et elles se sont affirmées au fil du temps. Certes, nous n’avons pas observé de « révolution », plutôt des progressions qui se mesurent en « sauts de puces ». De 2011 à 2013, les mouvements qui s’étaient amorcés se sont affirmés.

Nous présenterons dans les prochaines semaines les résultats d’un nouveau Baromètre portant sur l’année 2017. Nous verrons si les tendances amorcées se sont consolidées ou affaissées. Ce nouveau Baromètre sera plus ambitieux puisqu’il intégrera une analyse spécifique de la communication commerciale sous l’angle du genre.

Si on part de l’hypothèse sociologique selon laquelle la télévision contribue à la construction de nos représentations du monde, tout autant que nos représentations alimentent les images que nous propose la télévision, l’enjeux de la représentation des femmes apparaît de manière extrêmement saillante.

Partant de cette hypothèse, nos recherches visent à objectiver la situation en dressant un état des lieux de la question du genre à l’écran. Mais leur objectif est plus large : il s’agit de susciter une prise de conscience et d’instaurer un dialogue avec l’ensemble du secteur. Tout l’enjeu est de faire porter la réflexion sur le genre sur l’ensemble de la chaîne de production-diffusion audiovisuelle : qui est à l’écran et comment ? Mais aussi qui est derrière la caméra ? Est-ce que la dimension de genre est intégrée dans les instruments publics de soutien à la production audiovisuelle ?  Est-ce que la dimension de genre est intégrée dans les appels à projet ? La réflexion est globale.

Dans tous les cas, les travaux de recherche participent à mettre cette question à l’agenda des politiques publiques, de la régulation audiovisuelle et des médias. Les pérenniser c’est permettre que cette thématique ne quitte pas l’agenda et qu’elle finisse par entrer dans les réflexes.

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