Chaque année, le Prix du CSA récompense l’auteur.trice d’un mémoire qui apporte une contribution originale à la compréhension et à la réflexion sur les enjeux juridiques, économiques, sociologiques, politiques, culturels, technologiques ou créatifs de l’audiovisuel.
Le prix du CSA 2019 a été attribué à Hanan Harrouch, pour son mémoire de Master en journalisme intitulé « Journalisme audiovisuel belge francophone : minorités visibles, discriminations invisibles », présenté à l’Université Libre de Bruxelles. Ce mémoire se penche sur les parcours professionnels des journalistes « issu.e.s des minorités visibles » au sein de l’audiovisuel. Il interroge la construction de l’identité professionnelle de ces journalistes et les freins rencontrés au cours des carrières. Un mémoire qui soulève des questions essentielles relatives aux inégalités et discriminations vécues au cours des trajectoires professionnelles.
« Journalisme audiovisuel belge francophone : minorités visibles, discriminations invisibles«
L’objectif principal de la recherche était de répondre à la question : « Quelle identité professionnelle pour les journalistes issu.e.s de minorités visibles ? ». Partant de cette question, Hanan Harrouch émettait l’hypothèse selon laquelle « ces journalistes (seraient) victimes de discriminations freinant leur carrière ».
Sur base, notamment, des résultats d’études du CSA et de l’AJP mettant en lumière un faible taux de diversité ethnique dans le paysage médiatique belge, le but de ce mémoire était d’en comprendre les enjeux et les raisons, en alliant travail de recherche et de terrain.
Après avoir mené une série d’entretiens avec une dizaine de journalistes issu.e.s de minorités visibles, Hanan Harrouch dresse un bilan des expériences vécues par ces professionnel.le.s des médias : discriminations « camouflées » et sentiment de malaise, doubles voire triples discriminations liées à l’origine ethnique mais aussi au genre et à la fonction, événements vécus comme du racisme, difficultés pouvant mener à des discriminations dans les parcours professionnels, sont autant d’observations ayant pu ressortir de ces échanges.
Hanan Harrouch isole également divers mécanismes, empruntés pour partie aux études sur l’égalité hommes-femmes et transposés au domaine de la diversité ethnique, comme les phénomènes de plafond de verre, d’intersectionnalité ou de tokénisme.
Si ces constats constituent une première étape et un état des lieux général, « il convient désormais, souligne Hanan Harrouch, de zoomer sur les particularités d’un tel objet de recherche ». Elle cite notamment la question des femmes journalistes issues de minorités visibles, ou encore des personnes noires, qu’elle observe quasiment absentes des rédactions. Enfin, elle met en avant le besoin d’enquêter auprès des rédacteur.ice.s en chef, des hiérarchies et instances décisionnelles des médias, afin de mieux comprendre les mécanismes et le contexte liés à la l’embauche de journalistes issu.e.s de minorités visibles.
Quelles solutions ?
Interviewée par le CSA, Hanan Harrouch identifie différents leviers et pistes de solution aux problématiques rencontrées, comme la mise en place de cellules « diversité » au sein des rédactions, afin de favoriser la discussion, la formation et l’échange. Elle attire également l’attention sur l’importance de la discrimination positive ou de la mise en place de quotas. D’autre part, des outils juridiques existent : les journalistes devraient, selon H. Harrouch, être davantage soutenu.e.s par leur hiérarchie dans le recours à de telles procédures. La lauréate insiste enfin sur le sens des démarches d’intégration : quelle signification peut-on donner à celles-ci ? Quelles suites les rédactions réservent-elles à l’engagement de journalistes issu.e.s de minorités visibles en leur sein ? Pour Hanan Harrouch, il est essentiel que les médias s’impliquent dans ce processus d’intégration de manière consciente et continue.
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